Vers le Soleil levant – V

La visite de Kyoto

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Après To-kyo, il était temps d’intervertir les syllabes et de prendre le train direction Kyo-to. D’une capitale vers l’autre, de l’actuelle vers l’ancienne. Pendant un millénaire Kyoto fut la capitale du Japon (de 794 jusqu’à 1868). C’est une ville remplie d’histoire et avec plein de choses à voir : monuments, palais, temples connus et moins connus.

Je vais vous faire un aveu : je n’ai pas trop aimé LA ville de Kyoto mais plus ses points d’intérêt. Il y avait quelques endroits magnifiques et impressionnants, mais elle n’a pas touché mon cœur. Une des raisons à cela est peut-être que nous l’avons visitée lors d’un long week-end férié et il y avait beaucoup de monde partout. Mais c’est aussi partiellement ma faute d’avoir centré le programme autour des endroits les plus touristiques et populaires. Je le saurai pour la prochaine fois et à la place du sanctuaire hyper-instagrammable de Fushimi Inari, je prévoirai une visite du sanctuaire de la beauté (kawaï shrine) où l’on peut dessiner le visage idéal que l’on voudrait avoir sur les tablettes de prière en bois et ensuite prier pour que le vœu soit exaucé. Avec un peu de chance, je me retrouverai dans la peau d’une beauté de 25 ans ! Mais en attendant, je vais vous conter les endroits touristiques et populaires que nous avons visité.

Les temples et les sanctuaires

Kinkaku-Ji, le Pavillon Doré

Je vais commencer la partie sur les temples avec un qui n’en est pas un !

Le Pavillon Doré (ou le « Pavillon de la forêt aux biches », de son vrai nom) se situe dans la partie nord de Kyoto. Et ce n’est pas un temple en activité, mais une pagode destinée à garder des reliques sacrées bouddhistes avec une longue et sinueuse histoire. Pendant le XII-XIIIème siècle, les terres dans la région appartenaient à une famille d’aristocrates de Kyoto. Ensuite, au XIVème siècle, elles ont été achetées par le shogun Ashikaga Yoshimitsu. Le shogun a fait rénover la propriété en centrant le paysage des bâtiments et du jardin autour du Pavillon Doré nouvellement construit, qui devait symboliser le paradis sur terre. Les deux étages supérieurs du pavillon étaient recouverts de fines lamelles d’or, qui, dans le bouddhisme évoque la pureté et l’illumination. Après la mort du shogun et selon sa volonté, la propriété a été transformé en temple zen bouddhiste. Le temple a été incendié à plusieurs reprises au cours de l’histoire (la dernière fois en 1950) et reconstruit après à l’identique. Le bâtiment actuel date de 1955.

Le Pavillon Doré se trouve au bord d’un lac au milieu d’un parc superbe. Il se visite seulement de l’extérieur, en se promenant le long des allées qui l’entourent, autour du lac. Mais ne serait-ce que de l’extérieur, ce pavillon est magnifique, contrastant avec la verdure autour et avec les reflets scintillants dans l’eau du lac.

Le temple de Ryoan-Ji

Il y a plusieurs années (je n’ose avouer le nombre), dans mon jeu télévisé préféré sur la chaîne russe, une question a été posé aux participants sur les jardins zen en pierres japonais : « Pourquoi les pierres sont disposées de telle façon, que de n’importe quel point de vue, une pierre reste toujours cachée ? ». La question était illustrée d’une photo du jardin zen du temple Ryoan-Ji. La question, la réponse et la photo m’ont tellement impressionnées que je m’en souviens encore maintenant. Voilà pourquoi, si je devais choisir seulement un temple à visiter à Kyoto, il fallait que ce soit celui-ci.

Le jardin du temple est très connu, contrairement à son créateur. Il y a plusieurs hypothèses sur l’identité du créateur et sur son message caché dans la disposition des pierres. L’arrangement des pierres est estimé représenter des groupes d’arbres, des îles dans la mer, être un symbole de l’infini ou même un(e) tigre(sse) qui aide ses petits à traverser un point d’eau (un lac, une rivière ou même la mer). Les jardins en pierres zen étant destinées à la contemplation, peut-être revient-il à chacun de trouver le sens du jardin dans son propre cœur. Mais si vous n’êtes pas d’humeur introspective, vous pouvez faire un tour dans les reste du temple ou dans le parc verdoyant alentour.

Et au cas où vous me demandez la réponse à la question du jeu, les pierres sont disposées ainsi dans le but de rappeler que nous ne pouvons jamais connaître les choses dans leur intégralité, car une partie reste toujours cachées aux yeux.

Le temple Kyomizodera

Son nom se traduit par « le temple de l’eau pure ». Le temple est fondé en 780 et il est dédié à un des deux courants principaux du bouddhisme au Japon. Le temple est situé sur une colline recouverte d’arbres et près d’une cascade d’où provient son nom. Il est connu pour une de ses terrasses d’où l’on peut avoir une très belle vue sur la ville de Kyoto. En plus du bâtiment principal, vous pouvez également visiter la cascade et quelques bâtiments proches. Sans parler des jolis jardins (dans lesquels se trouvent beaucoup moins de monde et qui valent eux aussi le détour).

Pour arriver au temple, vous passerez par quelques rues bordées de maisons traditionnelles en bois, très pittoresques, avec des magasins et restaurants à leur rez-de-chaussée (Ninnenzaka et Sannenzaka). C’est une des parties les plus touristiques de Kyoto qui attire énormément de visiteurs, souvent vêtus de kimonos loués pour la journée pour mieux s’imprégner de l’atmosphère de l’ancienne capitale.

Mais si vous sortez des sentiers battus, une fois que vous avez pris les photos « de rigueur », vous pourrez trouver dans les petites ruelles des maisons traditionnelles, mais sans personne autour ! Ce qui est peut-être la meilleure partie de la promenade.

Le sanctuaire de Fushimi Inari

Peut-être le sanctuaire le plus « instagrammable » de Kyoto. Je ne peux le nier, les torii rouges et très proches les uns des autres sinuant en flanc de colline sont très photogéniques. Mais si vous voulez les voir dans toute leur splendeur, allez-y tôt, le plus tôt possible ! Ou le plus tard en soirée. J’y étais à 7h30 et il commençait à avoir foule.

Le sanctuaire est dédié au divinité shintoïste du riz, Inari, et ses messagers, les renards. Voilà pourquoi on retrouve beaucoup de statues de renards sur le territoire du sanctuaire. L’entrée se fait par une grande porte torii, don du seigneur de guerre Toyotomi Hideyoshi, qui mène au bâtiment principal. Juste derrière se trouve le début des sentiers sur le flanc de la montagne bordés de plus petits torii (Senbon Torii, « les mille torii »). Ils sont des dons de sociétés ou de personnes (commerçants, entrepreneurs…) et portent le nom et la date du don sur la partie arrière. Si vous arrivez à suivre l’intégralité de ce chemin, vous arriverez au sommet de la montagne avec une belle vue sur la ville. La ballade complète prendrait entre 2 et 3 heures, mais comme je ne suis pas une adepte des randonnées, je me suis arrêtée à mi-chemin et je suis descendue par un autre chemin, tout aussi agréable, à travers la forêt.

Le reste

La forêt de bambou d’Arashiyama

Arashiyama est un quartier au nord du Kyoto, avec de beau paysages, sentiers de randonnées, temples et même une forêt de bambou ! On dit que cette forêt aurait inspiré les dessinateurs du Studio Ghibli Hayao Myazaki et Isao Takahata pour certaines scènes dans leurs films (comme « Le conte de la princesse Kaguya ». Moi, personnellement, elle m’a plus fait pensé au film « Le secret des poignards volants » et les batailles dans la forêt de bambou (même si je sais que l’action ne se passe pas au Japon).

Il n’y a pas de batailles dans la forêt d’Arashiyama, mais plutôt une promenade parmi des tiges de bambou de plus de 10 mètres de haut, plein de verdure et (presque) de la sérénité… si vous faites abstraction des autres visiteurs. Certaines allées sont fermées aux piétons et accessibles uniquement en rickshaw, une activité payante. Nous avons suivi le trajet standard et visité ce que nous pouvions, en évitant les groupes organisés dans la mesure du possible. A un endroit, la forêt est traversée par une ligne de chemin de fer et il peut arriver d’attendre un peu la levée des barrières. Mais avec un peu de chance, vous pourrez tomber sur le passage d’un train avec un look plutôt rétro !

Kimono Forest

Pas très loin de l’entrée de la forêt de bambou d’Arashiyama, près de la gare de Randen se trouve la « Forêt de kimonos ». C’est une œuvre d’art à ciel ouvert qui offre une belle ballade. Il s’agit de 600 tubes transparentes de 2 mètres de hauteurs, qui ressemblent à des tiges de bambou et dans lesquelles sont exposées des tissus de kimono avec des motifs, dessinés dans le style caractéristique de la région de Kyoto (kyo-yuzen). Le style kyo-yuzen date de l’époque Edo et il est connu pour utiliser des couleurs vives et une façon particulière de dessiner fleurs et animaux. La teinture du tissu se fait aussi de manière spécifique : d’abord sont dessinées, avec de la colle (pour éviter le mélange des couleurs lors de la teinture) les contours des motifs. Ensuite, les motifs sont peints à la main, séchés et recouverts avec de la cire pour éviter d’être noyés par la couleur principale du tissu. Puis, le tissu est teinté de la couleur principale et chauffé à la vapeur pour enlever la cire des motifs. Enfin viennent plusieurs lavages pour enlever toute trace de cire et de colle avant que le tissue révèle tout son éclat.

Des tissus avec 32 motifs différents sont représentés dans les colonnes de la forêt de kimonos. Promenez-vous dans les chemins sinueux et admirez les motifs colorés et magnifiques (et aussi les garçons et les filles portant de vrais kimonos qui passent à côté de vous). La ballade est d’autant plus féerique après la tombée de la nuit, car les tubes sont éclairés de l’intérieur.

Le château Nijo

Laissons un peu les temples et autres sanctuaires de côté et allons visiter un château ! Le choix s’était posé entre le palais impérial de Kyoto ou le château Nijo. Le palais n’étant pas facile d’accès, nous nous sommes dirigés vers le château. Il a été construit en 1603 pour servir de lieu de villégiature du shogun Tokugawa Ieyasu lors de son passage à Kyoto. Après la fin du shogunat, le château a été possédé pendant quelque temps par la famille impériale qui en a ensuite fait don à la ville.

L’accès au château se fait par plusieurs portes, parmi lesquelles, celle de l’intérieur, la porte Karamon, est la plus spectaculaire. Elle est richement décorée dans le style Chinois, populaire à l’époque. Elle mène au bâtiment principal du château (le palais Ninomaru) et un beau jardin tout autour. Comme nous sommes arrivée un peu avant la fin de l’admission au palais, nous n’avons pas pu visiter la résidence du shogun. Mais nous avons pu nous promener à travers son jardin magnifique. Maintenant que j’y pense, nous n’avons pas vu un seul jardin moche ou mal entretenu au Japon ; tous, même les plus petits pots de fleurs devant les maisons, étaient soignés jusqu’au moindre détail !

The Face House

Dans une rue résidentielle de Kyoto, rempli de maisons plutôt traditionnelles, soudains vous tombez sur…un visage humain ! Cette bâtiment, pas tout à fait traditionnelle, a été construite en 1974 par l’architecte Yamashita Kaumasa pour servir de maison et d’atelier. Le point intéressant dans cette maison est que chaque trait anthropomorphique a la fonction correspondante : les yeux sont des fenêtres, la bouche c’est l’entrée et le nez cache un système de ventilation.

J’étais curieuse de la voir « en vrai » et je m’y suis rendue une après-midi, avant de m’arrêter pour boire un café et manger un gâteau au thé matcha sur le chemin du marché de Nishiki.

Le marché de Nishiki et la rue de Pontocho

Les premiers magasins du marché ont été ouverts en 1310, d’abord pour vendre du poisson en gros, et plus tard, au détail. Avec le temps, d’autres magasins avec d’autres produits s’y sont installés. Le marché de nos jours est une longue rue étroite et couverte, avec des petits (ou plus grands) magasins tout le long où vous pourrez acheter tout type de nourriture. C’est peut-être un des endroits le plus visités à Kyoto, après les temples. Il existe même des visites guidées avec dégustation. J’y suis allée peut-être au pire moment possible : il y avait tant de monde que l’on ne pouvait pas avancer facilement à travers la foule et encore moins s’arrêter à un étal. Il y avait de longues queues partout et la promenade est vite devenue une contrainte plus qu’un plaisir. Je n’ai même pas de photos, c’est dire ! Si un jour j’ai l’occasion d’y retourner, j’irai à l’ouverture des magasins !

Après ma visite loupée du marché de Nishiki, je me suis dirigée vers la rue de Pontocho, le long de la rivière Kamo. C’est un endroit où l’on trouve des cafés, bars et restaurants proposant une cuisine locale (ou pas trop locale) et aux prix diverses et variés. Beaucoup de restaurants qui sont au bord de la rivière ont des terrasses en bois pour profiter de la vue et de la fraîcheur en été. La rue de Pontocho et les ruelles adjacentes sont étroites, pavées et sentent le poisson et le saké chaud. Je suis passée par là vers la fin de l’après-midi, quand la plupart des restaurants et des bars n’étaient pas ouverts et il n’y avait pas encore beaucoup de monde qui cherchait un endroit pour diner ou prendre un verre. Je me serais volontiers arrêtée pour prendre une bière, mais la journée était longue et la fatigue commençait à se faire sentir : j’ai préféré rentrer à l’appart et dîner en famille dans un petit restaurant du quartier tenu par deux dames âgées et dont je vous parlerai dans un autre post.

Gion et geisha

Bien sûr nous ne les avons pas vues. Les geishas, je veux dire. Contrairement à l’idée reçue, les geishas (ou « geiko » selon le dialecte de Kyoto) ne sont pas des escorts de luxe, mais des artistes, chanteuses ou musiciennes instruites et formées aux différents arts, qui divertissent les convives lors d’un évènement avec de la musique, chant, dance, peinture ou discussion. De nos jours à Kyoto, il existe seulement quelques quartiers où les geiko et les maiko (apprentie-geisha) vivent dans des maisons dédiées (okya). Elles sortent presque exclusivement le soir quand elles ont une prestation dans une des maisons de thé (ochaya) où sont organisé les événements ou les banquets pour lesquels les geishas sont engagées. Le dîner et la compagnie d’une geisha sont habituellement très coûteux et sont réservés souvent à un cercle de clients restreint où l’on ne peut rentrer seulement que sur recommandation d’un client déjà existant.

Croiser une vraie geisha ou maiko est une chance et un privilège rare pour le touriste moyen. Nous n’avons pas eu cette chance. De plus, nous nous sommes promenés dans le quartier de Gion (le quartier le plus populaire où se trouvent beaucoup d’okya ou des maisons de thé) avant le coucher du soleil, ce qui n’a pas mis les chances de notre côté. Malgré cela, j’ai beaucoup aimé les rues bordées de maisons traditionnelles et peut-être qu’en cherchant bien se trouve une ochaya parmi les magasins et les restaurants chics de ce quartier.

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